EDITORIAL/ LE MATCH DE GALA AU LIEU DE LA FINALE

Jimi Hope nous avait prévenus des rêves de crabe. On savait tous que cela finissait toujours par la déception. Le drame. Comme des crabes, les Togolais amateurs de football ont rêvé d’une nouvelle phase finale de coupe d’Afrique. Des marchands d’illusions le leur ont vendu, après que la fenêtre Claude Leroy a été close. L’éléphant annoncé arrivera avec un pied cassé ; le sauveur préposé se révèle à l’arrivée un fanfaron qui n’a que la belle parole à proposer. Inviter à la patience est devenu son credo et son alibi de premier choix.

Malheureux. J’imagine combien les Togolais amateurs de football souffrent de constater que leur sélection est incapable de se qualifier deux fois de suite à une coupe d’Afrique à 24 sélections. ON est donc tombés si bas ? Hier, on disait que c’était la faute à Claude. Aujourd’hui, on dit qu’on n’a plus de joueurs et qu’il faut prendre le temps de donner du temps au Portugais. J’en souris. La vérité, à mon sens, est qu’on a cru avoir trouvé la solution au mal en obtenant le départ de Claude Leroy, au prix de mille complots et manipulations. On a ensuite installé Paulo Duarte dont on a dit tout le bien du monde. L’euphorie du nouveau départ et l’excitation née des résultats des derniers matches de la campagne des éliminatoires du mondial Qatar 2022 furent telles qu’on a oublié que le Portugais était un simple homme, faillible et susceptible d’erreurs.

On lui a donné le bon Dieu sans confessions. Je me souviens encore de ses déclarations triomphatrices au lendemain des quatre matches de ces éliminatoires. « On vient de faire quelque que le Togo n’a plus fait depuis des lustres » et d’en tirer une fierté et une satisfaction à tout rompre. Il en a tout rompu en effet. Croyant avoir réalisé le treizième travail de Hercule, le Portugais s’est laissé dominer et aveugler par l’émotion. Qui donc a pu dire que l’émotion est nègre ? Il lui faut revoir sa formule car le Portugais en a montré la preuve contraire. Croyant avoir trouvé le remède au mal togolais, se sentant en terrain conquis avec un statut de rédempteur applaudi, il est tombé dans le piège de la suffisance, de la légèreté et de l’impertinence. Il s’est tout permis, il a mélangé les torchons et les serviettes. Suffisamment longtemps pour que le mal soit fait, que l’objectif soit peru. Ou presque.

Sans doute que le réveil du crabe est douloureux pour lui : en se découvrant sur la montagne de farine de manioc bouillie, il se rend compte qu’il n’est pas au bon endroit, que son objectif n’est pas atteint, qu’il s’est trompé en chemin. C’est justement ce qui s’est passé. Paulo Duarte s’est fourvoyé en chemin. Alors que l’objectif était une coupe d’Afrique, il s’est permis de s’endormir sur les lauriers de la coupe du monde. Quand il s’est rendu compte de la bêtise, le repas de farine de manioc bouillie était déjà prêt à être servi. La course contre la montre qui a suivi n’a servi à rien. Gros Jean comme devant.

Voilà où nous sommes arrivés : au lieu que tout le Togo se mobilise pour ce dernier match contre le Cap Vert qui aurait pu être une finale hystérique et historique, c’est en dilettantes que les inconditionnels fans iront au stade de Kégué pour l’occasion. Un match de gala, rien que ça. C’est le prix de l’inconséquence et de l’incapacité à rester concentrés sur l’essentiel. Il paraît qu’il s’agit à présent de finir en beauté. Une berceuse ! J’en enrage. Pourquoi devrions-nous toujours nous contenter des vétilles et des bagatelles ? Que la Providence veille sur les Eperviers.

Kodjo M. AVULETEY
Kodjo M. AVULETEY
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